Malgré le manque de réalisme des sons, on perçoit clairement la grande maîtrise de l'écriture orchestrale, dans un style effectivement plus étoffé que les pièces récentes, où le travail s'est vu épuré. Mais il n'y a jamais de surcharge, même lorsque le tissu sonore s'épaissit de plusieurs pupitres à la fois, à certains moments correspondant d'ailleurs aux fortissimos (je le présume, n'ayant pas la partition sous les yeux).
La façon de faire dialoguer les instruments par de brefs motifs qui se répondent, faits de traits vifs, parfois réduits à des éclairs de quelques notes, est une caractéristique tout à fait reconnaissable du style de son auteur. Les basses soutiennent parfois ce dialogue mais le traitement vif des cuivres et bois graves ne les réduit pas au simple rôle de soutien. À 6', on a l'impression d'un écho de trompettes baroques, quasi "versaillaises" (à la façon d'un Charpentier), motif fort bien amené qui surgit pour disparaître presque aussitôt. L'inspiration générale rend hommage au XVIIIème siècle, sans la perruque, car l'orientation esthétique est, quant à elle, bien de notre temps, démontrant que l'on peut s'inspirer sans imiter.
J'ai cru discerner, à trois reprises au moins, la présence de ce qui ressemble à un célesta ou un instrument à lames (vibraphone ?) qui semble se surimposer à une harpe dans un effet très agréable.
Cette pièce est vivante, avec une structure apparemment tripartite qui valorise bien les tensions rythmiques et les contrastes, tout en conservant une unité formelle qui lui confère une identité sonore forte. Notons que l'instrumentation sert ces contrastes, montrant bien une conception globale mettant en interaction constante les timbres et l'écriture en elle-même.
On imagine pas une transposition au piano, aussi virtuose soit-elle, car elle ôterait une jambe à ce corps qui danse bien sur un double appui.
On attend la partition et, peut-être des sons plus à la hauteur de la musique.
Amitiés,
Yves.