Pour relativiser ces questions récurrentes sur l'utilisation du souffle, je cite ci-dessous un article que j'avais écrit à propos des techniques instrumentales et vocales tibétaines, pour tenter d'expliquer que le fait de "caler" l'émission du son sur une respiration "naturelle" obligée, n'est pas une règle incontournable, et que les musiques tibétaines ne se privent pas d'utiliser des techniques d'émission du son en continu, aussi bien en musique vocale qu'en musique pour instruments à vent (cuivres inclus)
Je me cite :
Concernant ce troisième mouvement [Tibetan Spirit], et notamment son « faux-bourdon », je précise que je n'ai jamais eu l'intention de m'en dispenser : l'écriture s'étant faite en deux temps, j'ai pu l'entendre au départ sans cette basse, et ce n'était pas du tout ce que je recherchais comme impression
Le but recherché in fine (et imparfaitement atteint, je le concède volontiers) était d'évoquer la structure de la musique traditionnelle tibétaine, dans laquelle le son harmonique grave est continu autant que possible (soit par la technique du souffle continu pour les instruments de petite taille, soit par le dédoublement des pupitres pour les trompes où le souffle continu n'est évidemment pas possible)
Dès que la trompe 1 commence à s'époumoner, la trompe 2 doit entrer en jeu, etc ... La différence avec un bourdon de cornemuse, par exemple, est que l'émission du son n'est pas linéaire, mais que la courbe en est plutôt légèrement sinusoïdale au moment des transitions, du fait que la hauteur stable du son de l'instrument relayeur est progressive sur les attaques, et que le nouveau tenuto n'est vraiment acquis empiriquement qu'au bout d'un court délai, sans même parler de la position spatiale distincte des deux protagonistes
Comme je ne voulais pas non plus d'une basse tonitruante, cet effet sinusoïdal est très discret, mais en y prêtant un peu attention, il reste perceptible
Certains de ces éléments ont été tirés d'un site consacré à la musique tibétaine, déjà cité dans un post antérieur :
gazette.ditaime.com/article/17.html
Tout cela pour nous rappeler (au cas où nous aurions parfois tendance à l'oublier), et en toute modestie que notre musique "occidentale" n'est qu'une des variétés "locales" du fait musical envisagé dès lors dans une acception plus générale, tout comme dans notre univers sonore ainsi relativisé, la "tonalité" n'est qu'une manière parmi beaucoup d'autres de composer de la musique...
Résumé : que la flûte joue en continu, ou que le violon informatisé se mette à ressembler à une "vielle à roue", n'est pas en soi un élément essentiel de l'appréciation de la valeur expressive fondamentale d'une composition, mais plutôt la perception de la position effective d'une pièce donnée par rapport à une certaine convention que l'on accepte ou non, une sorte de calligraphie subalterne...