Merci pour ce commentaire où il apparaît que cette pièce trouve grâce à vos yeux (oreilles), vous qui êtes sensible à la modernité et aux recherches de la musique prospective, comme je l'étais moi-même à votre âge, lorsque j'étudiais la musique électro-acoustique au GRM à Paris. Comme vous le constatez, j'en suis revenu mais sans rien renier de cette expérience de manipulation(s) du matériau sonore qui fut passionnante et complémentaire d'une formation plus classique au piano notamment.
J'en ai retiré une perception de l'orchestre qui fait fi des conventions (forcément pesantes) de l'orchestration classique et qui cherche à utiliser les instruments comme des matières ductiles et plastiques, à l'instar d'un assemblage de couleurs ou de matières palpables. Mais sur la matière musicale, le propos musical : rien. La matière concrète ou électronique est certes une matière musicale comme une autre mais elle ne m'intéresse pas dans mon travail de création.
Je m'intéresse plus aux ambiances sonores, aux suggestions imagées de la musique, qu'à l'innovation pour elle-même, qui, sans message musical solide, n'est qu'une posture esthétique privée de contenu : une belle peau entourant un corps désincarné, en quelque sorte. Pas mal de démarches installationnistes et conceptuelles des années 1980-2000 ont illustré cette impasse de l'art qui revient aujourd'hui à des "fondamentaux" comme en témoignent les deux plus récentes FIAC.
La musique emboîtera le pas aux arts plastiques, là comme ailleurs.
C'est pourquoi, je ne pense pas que le symphonisme tonal soit condamné à l'illustration sonore des jeux vidéo. Il me semble que ce soit plutôt la musique prospective néo-atonale, néo-wébérienne ou post-boulezienne qui vive ses derniers feux, comme en témoignent les récentes représentations de "La Cerisaie" de Philippe Fénélon, création de l'opéra de Paris de ce début 2012. Le radotage esthétique y était la règle et l'ennui la sanction. N'est pas Schönberg qui veut.
Pour être franc et un peu simpliste, je ne me pense pas comme néo-romantique ou post-cela, je ne porte aucun étendard stylistique et ne cherche à faire revivre aucun supposé âge d'or de la musique.
On colle parfois l'étiquette de "debussystes" à mes mélodies parce-que j'utilise la langue française, or ce sont des mélodies en français et non des mélodies "françaises", ayant personnellement une aversion pour le chant debussyste (
Pelléas étant un sommet de l'ennui lyrique).
Je me contente d'écrire la musique que j'aimerais entendre, les proclamations dialectiques à travers la musique étant étrangères à mon propos.
Je constate quand-même que le chant est une école de vérité car la voix connaissant des limites naturelles, elle ne tolère que faiblement les lubies "innovationnistes" (pour utiliser un barbarisme) qui entraînent souvent la ruine des cordes vocales des interprètes. Comme les "audaces" y sont limitées, la pertinence de l'écriture musicale du compositeur y apparaît plus crûment, dans toute sa vérité....voire toute sa médiocrité, pour ceux dont les artifices instrumentaux et technologiques servent de rideau de fumée.
D'ailleurs, le prochain concours d'automne sera un concours de composition vocale. Rien de tel pour évaluer l'écriture, le rapport au texte, au sens, à l'émotion, en un mot, pour juger de la "musique".
Ceci étant dit, même si je ne suis pas très présent sur le Forum Musical, ayant des activités professionnelles et autres assez (trop) prenantes, j'écoute les pièces qui y sont postées et j'apprécie beaucoup votre travail
, dans sa diversité, sa subtilité et son esprit d'ouverture. Je crois, qu'après avoir tâté de tous les médias et modes d'expression, vous trouverez un terrain suffisamment fertile pour y faire fructifier les germes d'un oeuvre encore en devenir
.
Amitiés,
Yves.