Bonjour François,
Il est vrai que l'on se sent emporté par une narration qui ménage ses effets de surprise, ses ruptures rythmiques et ses motifs qui apparaissent, s'élancent pour disparaître aussitôt, happés dans un tourbillon orchestral très savant. Les associations de timbres sont complexes et confèrent une indéniable richesse de couleurs à la pièce. Les bois sont souvent sollicités pour ce qui ressemble à des traits ascendants rapides avec de beaux rapports entre les hauteurs instrumentales qui permettent de bien les distinguer les uns des autres alors que, dans d'autres passages, vous avez visiblement recherché la fusion des timbres dans une unité créatrice de sonorités neuves, nées de l'addition des timbres propres aux pupitres impliqués.
On pourra remarquer la richesse de la nomenclature orchestrale avec notamment des registres instrumentaux graves bien représentés : contrebasson, clarinette basse et trombone basse ajouté aux trombones + tuba d'usage. La force des basses, en sons pédales tout particulièrement, s'explique aussi par cet usage d'instruments rarement associés dans une nomenclature standard, sauf lorsque l'on veut donner davantage d'accents dramatiques à la musique. C'est le cas et c'est réussi.
J'ai aussi aimé les passages ou les cordes graves scandent la mesure en pizzicati, donnant parfois à la pièce l'allure d'un armée sonore en marche.
Les percussions à sons déterminées sont, elles également, bien représentées. Leur écriture est savante car elles ne jouent pas les seconds rôles. Elles apportent une touche de scintillements, dans des rythmes vifs, associées à d'autres pupitres qu'elles soulignent ou avec lesquels elles établissent un dialogue quasi-concertant.
S'il fallait résumer l'impression laissée, c'est celle d'une musique d'une force rare et d'une grande maîtrise orchestrale, au service d'un poème symphonique chargé d'images, de sensations et dont l'écoute nous projette dans un univers fantasmagorique riche en émotions. Le hasard a bien fait son oeuvre car cette pièce vient d'être mise en ligne en même temps que la pièce pour piano, violon et alto de Sorges, elle aussi très aboutie mais qui en est l'antithèse, dans les moyens et l'atmosphère : deux réussites dans des sphères musicales totalement opposées en quelque sorte.
Amitiés,
Y.R.