Bienvenue, Invité
Nom d'utilisateur Mot de passe: Se souvenir de moi

SUJET: "Jeu de Variantes"

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1049

  • bricas
  • ( Admin )
  • Hors ligne
  • Administrateur
  • Message: 293
Je constate que l’on ne se bouscule pas au portillon pour déceler le plan de la pièce et je crois que c’était un peu trop demander de ma part. Dans ces conditions je vais l’indiquer ci-dessous.

Je pense que pour certains d’entre vous les modes à transpositions limités sont familiers, mais pour les autres j’indique quelques éléments concernant le mode expérimenté ici :

Il s’agit en fait du deuxième mode à transpositions limitées décrit par Messiaen. Le plus simple est donc de reprendre le classement des transpositions tel qu’il est proposé par Messiaen . Elles sont au nombre de trois :

1ère transpositon : do - ré bémol –mi bémol – mi bécarre – fa dièse – sol - la - si bémol – do -
2ème « : do dièse – ré – mi – fa – sol – sol dièse – la dièse – si – do dièse -
3ème « : ré – mi bémol – fa – fa dièse – sol dièse – la –si- do – ré –

Dans la partie de la pièce actuellement en ligne ne sont utilisées que la première et la troisième transposition. Mon idée était d’expérimenter ces deux transpositions d’abord successivement et ensuite simultanément en les répartissant par pupitres pendant une durée suffisante pour bien les identifier. Pour le titre de la pièce j’ai désigné les transpositions par le terme de « variantes ». La devinette proposée ne concernait que la première partie au cours de laquelle les deux transpositions se succèdent pendant 1’13’’ selon le plan (arbitraire) suivant :

Mesures 1 à 8 : 1ère transposition pour l’ensemble des pupitres
« 9 à 16 : 3ème « « « « «
« 17 à 40 : alternance des deux transpositions toutes les 4 mesures pour l’ensemble des pupitres.

Ensuite :
A partir de la mesure 41 l’écriture continue sur le même mode, mais il y a mélange libre des deux transpositions entre les pupitres ou unicité de transposition.

Messiaen décrit les façons d’assurer les modulations que peuvent connaitre les modes à transpositions limitées, soit dans un mode donné, soit entre les modes. Je n’ai pas tenté de m’y conformer, mais cela doit, en principe, faciliter le passage entre les transpositions. En fait, ce passage, tel qu’il est pratiqué ici, c'est-à-dire sans préparation délibérée, ne m’a pas semblé bien problématique, la facilité tenant sans doute à la nature de ce mode.

J’ai terminé une dernière variation qui est dans la première transposition et je prolonge la pièce par une partie réalisée avec les trois transpositions simultanément. Dès que ce sera terminé, je mettrai tout en ligne avec la partition.

J’ignore quelle peut être la réaction des férus d’harmonie et de contrepoint à ma démarche ! peut-être sera-elle jugée complètement farfelue !

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1050

  • nicolasmarty
  • ( Utilisateur )
  • Hors ligne
  • Platinum Composer
  • Message: 356
En tant que "féru d'harmonie et de contrepoint" (au moins un peu), je ne trouve pas ça complètement farfelu, mais un peu simple, tel qu'expliqué ici. Vous ne dites pas comment vous gérez, justement, la rencontre entre les transpositions au niveau de l'harmonie et du contrepoint : y'a-t-il des limites que vous vous posez quand à ce qui est possible ? Sinon, le tout risque de ne pas pouvoir tenir longtemps.

Par ailleurs, j'avais quand même bien senti la polymodalité ! (qui n'est pas pour moi seulement quand deux modes différents sont utilisés, mais aussi quand des transpositions d'un même mode sont utilisées simultanément) Mais c'est une blague, puisque je la voyais dès le début.

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1051

  • bricas
  • ( Admin )
  • Hors ligne
  • Administrateur
  • Message: 293
Il est exact que l’on peut considérer le mélange des transpositions d’un même mode comme de la polymodalité et ma définition l’attribuant au seul mélange des modes était trop restrictive. Dont acte.

En dehors de la répartition des transpositions de façon durable et stricte entre les pupitres, je n’ai aucune prétention (ni envie) à suivre des règles pour gérer cette polymodalité. Les seules limites que je me fixe, sont celles que m’impose mon oreille, et à ce sujet, le mélange des trois transpositions, dont je m’occupe à l’heure actuelle, est assez délicat. Ce n’est pas à moi de dire si mon oreille « tient longtemps » ou non, mais en tout cas je m’y efforce. Je conçois fort bien que pareille position puisse choquer un étudiant au conservatoire…mais tant pis.

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1052

  • nicolasmarty
  • ( Utilisateur )
  • Hors ligne
  • Platinum Composer
  • Message: 356
Je ne suis pas encore étudiant au conservatoire. Mais en tant que musicologue, ça me choque parce qu'il n'y a du coup pas de système dans l'organisation microscopique, et que cela risque de faire vite perdre le fil et l'intérêt à quelqu'un qui ne connait pas la partition. Mais c'est une démarche valable aussi !

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1056

  • bricas
  • ( Admin )
  • Hors ligne
  • Administrateur
  • Message: 293
Nicolas,

Votre dernière affirmation, selon laquelle il est nécessaire d’avoir un « système dans l’organisation microscopique », faute de quoi l’auditeur perd l’intérêt à la musique, m’intrigue. Les compositeurs actuels utilisent-ils de tels systèmes et dans ce cas, de quels systèmes s’agit-il ? A qui pensez-vous précisément ? Personnellement, j’ai l’impression que seuls les compositeurs d’obédience sérielle peuvent encore revendiquer une certaine discipline de ce point de vue, mais combien en reste-t-il ? La majorité me parait avoir adopté une grande liberté. Sont-ils moins intéressants pour autant ?

---Re: "Jeu de Variantes" il y a 11 ans, 9 mois #1057

  • nicolasmarty
  • ( Utilisateur )
  • Hors ligne
  • Platinum Composer
  • Message: 356
Ce que je voulais dire, c'est que sans système, le risque de tourner en rond ou de ne pas "dire" grand-chose à l'intérieur d'une partie est grand. Le système n'a pas besoin d'être mathématique, ni même conceptuel, ni même écrit. Mais tant qu'il n'est pas contrôlé, le fil de la plume part dans tous les sens, et l'auditeur peut s'y perdre.

Il y a déjà dans votre pièce un système macroscopique : le champ harmonique créé par le mode octotonique (diminué / mode 2 / etc.). Maintenant, ce dont je vous parle comme organisation microscopique relève de la même idée de contraste dont je parlais, mais plutôt que d'étudier une partie de quelques mesures, regarder sur chaque instant comment évolue l'utilisation du mode (combien de voix ? quelle densité rythmique ? quelle densité harmonique ?).

Et ce sont ces évolutions qui constituent la perception, autant que l'identité des modes et des notes. On perçoit d'abord si le spectre est chargé ou vide, si le temps est rempli ou très étalé, et si le spectre se charge, se vide, si le temps se remplit, s'étale, si le registre est étalé, serré, aigu, medium, grave. C'est le mode d'écoute "par défaut", avant l'acculturation tonale et la recherche de cadences et autres. C'est donc ce genre de choses qu'il faut "systémiser" pour éviter de se trouver dans la situation où ces évolutions se réalisent presque automatiquement sans que le compositeur ne les contrôle (auquel cas on peut être sûr que le tout sera vite ennuyeux parce qu'il n'y aura pas de réel intérêt dans le temps).

Sincèrement, je ne saurai dire si les compositeurs d'aujourd'hui utilisent ce genre de systèmes consciemment. Ca doit dépendre beaucoup des compositeurs. Mais ce ne sont pas que les sériels qui travaillent avec des systèmes : les spectraux (qui sont à l'opposé) utilisent des systèmes tout aussi rigides (les suites et analyses harmoniques, et les contrastes pertinents pour la perception, justement, sont travaillés - lire Grisey). Et quand je dis "pertinents pour la perception", c'est bien pour dire que le système n'a pas besoin d'être perçu (d'où l'impression de liberté adoptée) pour avoir un effet sur l'auditeur.

C'est une pensée qui demanderait à être plus contrôlée avec des références de psychoacoustique et d'expériences d'écoute pour être bien illustrée, mais je n'ai pas le courage de retrouver ça aujourd'hui

En résumé (très bien décrit dans Audible Design de Wishart) il faut différencier entre identité (un mode a une identité harmonique qui ne dépend pas de son utilisation / une même réverbération appliquée à tout un fichier audio est une identité) et transformation (comment le mode est développé / comment la réverbération est modifiée dans le temps), et que c'est la transformation qui est intéressante dans le temps, pas l'identité.
Temps de génération de la page: 0.34 secondes