Mettre en musique un poème aussi puissant relevait d'une gageure qui a été ici relevée avec brio.
L'orchestration y est maîtrisée avec une utilisation très expressive des timbres instrumentaux et de leurs diverses associations possibles, nuances et articulations comprises.
On peut remarquer l'aptitude du compositeur à bâtir un discours parallèle au texte, à l'aide de motifs récurrents qui réapparaissent à différents moments-clés du "discours" poétique mais éminemment politique de victor Hugo.
J'ai particulièrement apprécié les contrastes entre certains passages d'une écriture serrée, nerveuse et tendue et d'autres, plus solennels.
L'approche dépasse la simple mélodie ou le lied pour orchestre pour atteindre une dimension quasi-opératique, dans la volonté délibérée de structurer l'oeuvre en différents "actes" au contenu esthétique bien marqué et bien différencié, tout en conservant une cohérence d'ensemble, telle une colonne vertébrale logique au discours musical, en phase avec celle du propos poétique.
L'écriture des voix se veut simple et verticale, presque homorythmique. On peut l'interpréter de façon métaphorique : c'est une seule voix, celle de la France, qui parle derrière la voix du poète, avec toute l'emphase voulue et que le compositeur n'a pas occultée, bien au contraire, en en faisant une matière évidente de sa palette expressive.
La tension et l'attention sont ainsi soutenues d'un bout à l'autre de l'oeuvre et les quelques "pauses", loin d'être des instants de répit, accumulent dans le silence l'énergie qui est amenée à se déployée ensuite, dans un crescendo aboutissant au très beau tutti final qui ne craint pas d'afficher sa tonalité toute "romantique", comme il sied à un tel texte, dont la poétique des mots exalte la force d'un engagement politique qui n'a jamais faibli chez Hugo.
Amitiés,
Y.R.