Bonjour,
J'ai du mal à associer la révolution atonale (qui n'est pas vraiment une révolution pour moi, mais je comprends le point de vue) à l'art conceptuel, étant donné qu'il y a eu du conceptualisme dans la musique aussi (le 0'00" de Cage, notamment, et dans une certaine mesure, lors de la première écoute, le 4'33"), et que la musique dodécaphonique, et ce qui a suivi (sériel, spectral, hyperchromatique, stochastique, bruitiste, etc.) n'a aucun aspect conceptuel à mon sens, puisque le conceptuel désigne (pour moi, mais Yves saurait certainement mieux le définir) une forme d'art dont le contenu est moins important que l'idée, et dont le contenu ne peut être appréhendé qu'à travers l'idée pour faire sens, sans que l'idée ne puisse s'effacer derrière le mode de perception.
En fait, en regardant l'urinoir de Duchamp, on ne peut voir qu'un urinoir, à moins de procéder à des changements de perspective perceptive qui font qu'on peut voir une forme, des jeux de couleur, etc. Mais ce n'est pas là l'intérêt de la pièce, qui se trouve plutôt dans la confrontation de l'utilité qu'on en perçoit immédiatement avec l'idée de l'oeuvre d'art exposée. Et il ne s'agit pas là pour moi d'un mode de perception particulier, mais d'un mode de conception (d'où "conceptuel").
Alors que du côté des musiques contemporaines, il s'agit d'acquérir des formes d'écoute qui, une fois acquises, font que l'auditeur ne se pose même plus la question de savoir s'il s'agit d'un jeu de densités rythmiques ou spectrales, de la création d'un champ harmonique, d'un geste mélodique dirigé, etc., mais l'entend immédiatement. Il ne s'agit pas de questionner ce qu'on entend, mais plutôt de l'entendre d'une autre manière, d'élargir la palette de notre écoute. Le concept peut passer par là pour le compositeur (comme c'est le cas aussi pour les musiques tonales) et éventuellement pour l'auditeur, mais il s'agit bien alors d'un medium pour la composition / la perception, et non d'une voie obligée.
J'ai l'impression que c'est une idée bien trop répandue que "la" musique contemporaine est intellectuelle, conceptuelle, réservée à l'élite et qui nécessite d'être comprise pour être appréciée. Je ne comprends pas le quart de ce que j'écoute la plupart du temps, ça ne m'empêche pas de l'apprécier !
Musicalement