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L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses
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TOPIC: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 5 months ago #1933

  • bricas
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Bonjour Nicolas,

Vous vous demandez quels compositeurs je place dans « l’atonal libre » : reportez-vous à ma réponse, précédent la votre dans ce fil ! (N°1921).
.
Je souscris volontiers à votre conclusion qui mentionne la grande liberté de choix qui s’offre aux compositeurs actuels. Ce qui compte, c’est la cohérence et la transmissibilité de l’idée musicale, qualités qui ne dépendent pas forcément de techniques d’organisations compositionnelles conscientes, clairement établies et analysables. Dans une certaine mesure, la composition musicale ne s’apprend pas, et de nos jours sans doute moins que jamais. Mais les classes de composition ont toujours leurs raisons d’être…

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 5 months ago #1934

  • nicolasmarty
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J'ai relu votre post, mais je n'y trouve pas ni définition de l'atonalisme libre (par autre chose que l'opposition à la tonalité et à l'opposition à l'organisation de cette opposition), et surtout, pas de noms de compositeurs. Et en y réfléchissant, je n'en trouve pas moi-même qui rentreraient dans cette définition, à part peut-être au début du XXe siècle (Schoenberg à ses débuts).

De plus, en relisant, ce que je n'avais pas remarqué ce matin, j'ai vu que vous mettiez stochastique et sériel dans le même panier de l'opposition à la tonalité, ce qui n'est pas le cas pour le stochastique (et qui n'est plus le cas des techniques sérielles aujourd'hui), qui serait plutôt du côté de la recherche de timbre et de comportements sonores de groupes, sans se soucier de la tonalité le moins du monde. Mais, bien évidemment, cette recherche musicale n'aboutit pas à la tonalité, qui n'a, il faut bien le reconnaître, pas énormément à voir avec le son lui-même (par opposition aux notes), mais surtout rien à voir avec son comportement (ce qui n'a pas empêché les compositeurs de musique tonale de composer, à la fin du XIXe siècle, ces comportements grâce à l'orchestration - je pense notamment à Sibelius et Mahler).

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 5 months ago #1935

  • rinaldi
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Bonjour,

Merci Nicolas de renouer avec ce forum, le temps d'une polémique émanant d'une institution pourtant créée pour émanciper le savoir des cadres radoteurs de la scholastique médiévale. Il apparaît, en effet, que les tenants et aboutissants de cette polémique franco-parisienne soient vains. Par contre, ce qui se situe entre ces deux extrémités est intéressants et rejoint ce que le XXème siècle a également légué aux arts plastiques : l'éclatement des catégories et systèmes traditionnels en une pléthore de systèmes / doctrines, plus ou moins pérennes mais ayant donné le jour à des expériences toujours enrichissantes.
Si l'on devait établir un parallèle approximatif entre les deux sphères - musicale et plastique - on pourrait comparer la révolution atonale à l'art conceptuel, par rapport aux catégories habituelles de l'art (sculpture, peinture, etc.). Que l'on aime ou pas, que l'on comprenne ou non, c'est un patrimoine foisonnant dans lequel tout un chacun pourra trouver de quoi se contenter. C'est pourquoi, l'entreprise de démolition entreprise par Ducros semble ici plutôt acrimonieuse et contre-productive.
Remarquons que ce sont souvent les compositeurs ou artistes médiocres qui se s'érigent en ardents défenseurs d'un art qu'ils servent généralement bien mal. À toutes ces polémiques radoteuses, je préfère le silence délectable d'un Ravel, d'un Hersant ou d'un Bacri, dont les musiques n'ont nul besoin de manifestes ampoulés pour se présenter ou se représenter aux auditeurs.

Amitiés,

Yves
Oeuvres en écoute directe sur www.rinaldi-musica.fr

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 5 months ago #1940

  • nicolasmarty
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Bonjour,

J'ai du mal à associer la révolution atonale (qui n'est pas vraiment une révolution pour moi, mais je comprends le point de vue) à l'art conceptuel, étant donné qu'il y a eu du conceptualisme dans la musique aussi (le 0'00" de Cage, notamment, et dans une certaine mesure, lors de la première écoute, le 4'33"), et que la musique dodécaphonique, et ce qui a suivi (sériel, spectral, hyperchromatique, stochastique, bruitiste, etc.) n'a aucun aspect conceptuel à mon sens, puisque le conceptuel désigne (pour moi, mais Yves saurait certainement mieux le définir) une forme d'art dont le contenu est moins important que l'idée, et dont le contenu ne peut être appréhendé qu'à travers l'idée pour faire sens, sans que l'idée ne puisse s'effacer derrière le mode de perception.

En fait, en regardant l'urinoir de Duchamp, on ne peut voir qu'un urinoir, à moins de procéder à des changements de perspective perceptive qui font qu'on peut voir une forme, des jeux de couleur, etc. Mais ce n'est pas là l'intérêt de la pièce, qui se trouve plutôt dans la confrontation de l'utilité qu'on en perçoit immédiatement avec l'idée de l'oeuvre d'art exposée. Et il ne s'agit pas là pour moi d'un mode de perception particulier, mais d'un mode de conception (d'où "conceptuel").

Alors que du côté des musiques contemporaines, il s'agit d'acquérir des formes d'écoute qui, une fois acquises, font que l'auditeur ne se pose même plus la question de savoir s'il s'agit d'un jeu de densités rythmiques ou spectrales, de la création d'un champ harmonique, d'un geste mélodique dirigé, etc., mais l'entend immédiatement. Il ne s'agit pas de questionner ce qu'on entend, mais plutôt de l'entendre d'une autre manière, d'élargir la palette de notre écoute. Le concept peut passer par là pour le compositeur (comme c'est le cas aussi pour les musiques tonales) et éventuellement pour l'auditeur, mais il s'agit bien alors d'un medium pour la composition / la perception, et non d'une voie obligée.

J'ai l'impression que c'est une idée bien trop répandue que "la" musique contemporaine est intellectuelle, conceptuelle, réservée à l'élite et qui nécessite d'être comprise pour être appréciée. Je ne comprends pas le quart de ce que j'écoute la plupart du temps, ça ne m'empêche pas de l'apprécier !

Musicalement

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 4 months ago #1946

  • rinaldi
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Bonjour Nicolas,

Je souscris tout à fait à tes remarques. La comparaison que j'effectuais avec l'art conceptuel relevait surtout d'un changement de perspective de l'art, sachant que, par "nature", la musique est déjà un art "abstrait" et qu'elle a pu évoluer, notamment grâce à l'apport de la musique concrète, vers l'exploitation d'une matière première sonore "figurative", pour reprendre le terme de peinture opposable à celui « d'abstraction".
Dans la réalité, toute oeuvre est forcément empreinte de concept et la formalisation relève de codes plus ou moins stricts selon les époques, et toujours en interaction avec la conception. Ainsi la peinture a-t-elle pu cheminer, en partant d'un souci de reproduction d'une réalité extérieure - par sa re-présentation – vers une libération progressive du réel pour n'avoir à s'occuper que d'elle même, de sa propre matière faite de couleurs mêlées de liants. L'abstraction, puis l'art conceptuel ont constitué, au XXème siècle, les jalons marquants de cette quête d'indépendance : la peinture et l'image peuvent revendiquer de n'avoir d'autre sujet qu'elles mêmes et sont devenues des « objets » plastiques à part entière. Le regard du spectateur s'est, dans la foulée, également libéré de cet assujettissement au réel.

Peut-on établir un parallèle avec la musique ? Certes non, sauf à considérer que l'atonalité a représenté une rupture similaire pour la musique que celle de l'abstraction pour la peinture en affranchissant l'auditeur des contraintes référentielles héritées des époques antérieures. La modernité s'est chargé de prolonger cette indépendance dans la perception, qu'elle soit auditive ou visuelle, le point commun restant la place prépondérante accordée au concept générateur de l'oeuvre, en tant que fil reliant l'auditeur / spectateur à l'oeuvre / objet lui-même. C'était sur ce point que portait ma comparaison.

Amitiés,

Yves
Oeuvres en écoute directe sur www.rinaldi-musica.fr
Last Edit: 10 years, 4 months ago by rinaldi.

Re: L'Atonalisme en questions : les notes fâcheuses 10 years, 3 months ago #1987

Je renoue avec plaisir avec ce forum après quelques années. Bravo pour cette vidéo!

A vrai dire, ce qui m'a surtout toujours gêné vis à vis de la musique atonale, c'est son caractère "obligatoire" dans les institutions. La réaction de Dusapin est à ce titre très significative : "Comment, des gens intelligents comme le Collège de France laissent un contestataire de notre ordre s'exprimer ainsi?" (je ne cite pas, je résume...)
Ma génération (je suis né en 1968) n'en peut plus de cet ordre là. Des compositeurs atonaux sont "sincères", ils composent ce qu'il entendent, mais les institutions, elles, sont aux seules mains de ces "modernes" autoproclamés. C'est ce qui m'inquiète le plus. Pour ma aprt, j'ai dû me réfugier dans mon home-studio, et comme beaucoup ici m'autoproduire et m'autopublier sur mon site. La liberté est à ce prix!

Concernant l'atonalité elle-même, j'ai pu écrire que cette musique était ce que les européens ressentaient lorsque cette musique est apparue, durant l'entre deux-guerres pour les viennois, et après la seconde dans le reste de l'Europe :
"Ce courant est apparu pour la première fois à Vienne après la première guerre mondiale, et s'est ensuite étendu à l'Europe entière après la seconde. Ceci n'est pas un hasard. Ces guerres ont troublé l'âme de l'humanité et choqué sa sensibilité comme jamais aucun événement ne l'avait (heureusement) fait auparavant. Cette sensibilité meurtrie était dans un tel état de choc que la musique ne pouvait l'exprimer qu'en mettant en avant les éléments de mouvement propres au langage musical : infirmation des temps forts, absence de cellule mélodique dans la construction des phrases, dissonance exacerbée, éparpillement du timbre, ambitus très petits ou très grands.
Pourtant, l'idée de tension et de détente n'est pas absente de ces œuvres comme élément structurant. « Méthastasis » de Xénakis par exemple commence par un unisson qui, par un jeu de glissandi, se déploie en un accord chromatique couvrant tous les registres. L'épisode central est fait de pizz très brefs distribués comme au hasard (par des lois de probabilité dit l'artiste), avant que l'on ne réentende l'accord de l'exposition redevenir un unisson par le même jeu de glissandi. Cet aspir/expir suffit à donner sa forme à l'œuvre. Toutefois, cet excès de mouvement n'a pas permis à ces œuvres de s'installer dans la sensibilité populaire, et si beaucoup ont fait sensation, elles n'ont pu assez émouvoir pour laisser un réel souvenir comme peuvent le faire les œuvres mélodiques.
Les œuvres qui d'ailleurs ont le plus marqué leur auditoire étaient, soit comme dit dans notre première partie, des oeuvres de musique électronique, soit des œuvres en rapport avec les atrocités commises durant la seconde guerre mondiale. Nous citions ainsi le « Chant des adolescents dans la fournaise » de Stockhausen qui présente différentes distorsions de voix d'enfant mêlées à des timbres électroniques épars (la composition en est certainement sérielle)."

Maintenant que l'Europe est en paix, pourquoi n'appaisons-nous pas notre sentiment?
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